lundi 28 décembre 2009

"La grammaire de Dieu"


A priori, je ne suis pas fan de nouvelles. Mais j'étais en train de feuilleter ce recueil dont la couverture et le titre avaient attiré mon regard à la Fnac de Toulouse lorsque mon portable a sonné: c'était mon père, pour m'annoncer que mes valises disparues avaient été retrouvées et seraient livrées le soir même à son domicile. J'ai pris ça pour un bon présage et acheté "La Grammaire de Dieu : Histoires de solitude et d'allégresse".

Ainsi ai-je débusqué ma dernière très bonne surprise littéraire d'une année globalement assez riche. Car chacun des 25 petits récits qui composent cette "Grammaire de Dieu" est une merveille de cruauté et d'absurdité, aussi percutante que savoureuse. Bien sûr, ça grince de tous les côtés, mais d'une façon plus souvent jubilatoire que déprimante. Il y a de la satyre politique et religieuse, des portraits de marginaux et des mythes réinterprétés, le tout d'une écriture fine et enlevée, sans jamais de baisse de rythme ni de niveau. Je recommande absolument.

mercredi 23 décembre 2009

"La princesse des glaces"


Impossible d'entamer les aventures d'Erica Falck sans penser à "Millenium". D'abord parce que dans un cas comme dans l'autre, il s'agit de séries policières dont le premier tome se déroule dans une ville minuscule de la côte suédoise. Ensuite parce que toutes deux sont éditées en France par Actes Sud, avec la même couverture noire bordée de rouge et ornée d'un dessin en médaillon.

La ressemblance, hélas, s'arrête là. Alors que dans "Les hommes qui n'aimaient pas les femmes", les indices étaient distillés au compte-gouttes, avec une montée croissante de l'horreur, dans "La Princesse des glaces", on peut reconstituer les grandes lignes de l'intrigue dès la page 100 - et après, on s'ennuie un peu. Quant à Erica Falck, ce serait une héroïne fade et inintéressante même si on ne la comparait pas à Lisbeth Salander.

Mais le pire de tout, c'est la traduction française. Certes, je ne parle pas suédois; je suis cependant capable de reconnaître des phrases lourdes et mal construites, surtout quand il n'y a quasiment que ça sur près de 400 pages. J'ai passé toute ma lecture à raturer mentalement chaque page, à biffer des mots au feutre rouge, à corriger des erreurs de syntaxe et à tracer dans la marge de grandes points d'exclamation stupéfaits. Actes Sud m'avait habituée à mieux, et je me félicite de n'avoir pas investi directement dans le coffret paru à l'occasion des fêtes de Noël.

dimanche 20 décembre 2009

"Seule Venise"


Quittée par son grand amour, une femme à la dérive vient se réfugier à Venise en plein hiver pour noyer son chagrin dans les canaux et tenter de se retrouver. Rien de bien nouveau ou de bien compliqué, donc. Mais le charme de "Seule Venise" ne tient pas à son inventivité. Avec un style très simple - celui d'un journal intime, presque, d'autant que l'histoire est racontée à la première personne -, Claudie Gallay rend à merveille l'atmosphère hors du temps de Venise, véritable héroïne de son roman. En lisant ce dernier, on est instantanément transporté avec la narratrice à bord de vaporettos poussifs, le long de venelles embrumées ou dans le salon d'une pension de famille dont l'humidité décolle les tapisseries. Moi qui ne suis allée qu'une seule fois à Venise et qui n'ai pas du tout aimé, ce livre m'a donné envie d'y retourner pour contempler la ville d'un regard nouveau. Encore une belle découverte que je dois aux éditions Babel, filon quasi-inépuisable en la matière.

samedi 12 décembre 2009

"Rosalie Blum"


Il y a quelques années, j'avais lu et adoré un petit ouvrage inclassable acheté pour son titre rigolo: "Une araignée, des tagliatelles et au lit, tu parles d'une vie !". Aussi, quand j'ai vu que Camille Jourdy avait récidivé avec une bédé en trois tomes chaudement recommandée par les vendeurs de Brüsel, je n'y ai jeté qu'un rapide coup d'oeil avant de l'embarquer.
(Attention: spoilers)

"Rosalie Blum, Tome 1 : Une impression de déjà-vu", c'est l'histoire de Vincent, un coiffeur d'une petite trentaine d'années encore célibataire, qui vit seul dans l'appartement au-dessous de celui de sa vieille maman complètement siphonnée. Un jour, son chemin croise celui d'une épicière qu'il lui semble avoir déjà rencontrée, mais où? Par curiosité et pour tromper son ennui, Vincent se met à suivre cette femme à l'existence aussi morne que la sienne...

"Rosalie Blum, Tome 2 : Haut les mains, peau de lapin !", c'est l'histoire d'Aude qui a abandonné la fac et n'ose pas le dire à ses parents. Elle habite avec un Kolocataire cambrioleur et aspirant artiste de cirque, qui passe son temps à lui emprunter l'argent qu'elle n'a pas et fait défiler chez eux les animaux les plus bizarres. Un jour, sa tante Rosalie - le mouton noir de la famille - demande à Aude de suivre le mystérieux jeune homme qui la file depuis quelque temps afin d'en apprendre davantage sur lui.

Enfin, "Rosalie Blum, Tome 3 : Au hasard Balthazar !", c'est l'histoire de Rosalie qui traîne un lourd secret entre ses cours de chant dans une chorale, ses longues promenades solitaires et les soirées qu'elle passe à boire dans des bars. Elle a repéré Vincent et, bien loin de s'inquiéter qu'il la suive, elle s'en amuse et décide de le prendre à son propre piège.

J'ai eu un vrai coup de coeur pour cette mini-série, aussi réussie dans la forme que dans le fond. Des héros qui dérivent doucement sans s'en rendre compte ni vraiment en souffrir, des personnages secondaires complètement barrés et donc savoureux, un graphisme qui fait la part belle aux petits détails du quotidien, une histoire pleine de mélancolie et de tendresse: "Rosalie Blum" est une réussite à tous points de vue. Je vous la recommande très chaudement, d'autant qu'à l'occasion des fêtes de fin d'année, elle vient de sortir présentée dans un coffret qui fera un joli cadeau pour vous-même ou pour un amateur de bédé de votre entourage.

lundi 7 décembre 2009

"Sous le charme de Lillian Dawes"


Au printemps dernier, j'avais lu plusieurs critiques très élogieuses sur ce livre. Je pensais l'inscrire sur ma liste d'emplettes à faire, et puis j'ai oublié, et "Sous le charme de Lillian Dawes" m'est complètement sorti de la tête jusqu'à ce que je le retrouve sur une étagère de Pêle-Mêle, état quasi-neuf et au tiers de son prix originel.

Je suis bien contente que le hasard l'ait remis sur ma route, parce que j'ai passé un délicieux moment avec ce roman exquis. Pendant la Guerre Froide, Gabriel, orphelin de bonne famille âgé de 17 ans, vient de se faire expulser de son pensionnat de garçons. Il se réfugie à New York chez son frère aîné Stewart, un intellectuel qui fréquente secrètement les milieux communistes. En attendant la rentrée scolaire suivante, Gabriel traîne dans les rues et les cafés de Manhattan, fait la connaissance de son excentrique tante Lavinia tout juste rentrée d'Europe où elle vient de passer vingt ans, et surtout s'amourache de Lillian Dawes, une mystérieuse jeune femme qui multiplie les talents et les identités...

Roman initiatique, "Sous le charme de Lillian Dawes" met en scène un héros qui m'a fait penser à Holden Caulfield face à une héroïne que l'on imagine sans peine interprétée par Audrey Hepburn. L'atmosphère du New-York de l'après-guerre y est décrite de façon très évocatrice, avec une plume à la fois légère et grave, empreinte d'une élégance mélancolique comme les errances de Gabriel. Malgré une fin un peu rapide à mon goût, un très joli moment de lecture.