jeudi 13 septembre 2012

"Snuff"


Si je continue à suivre fidèlement les Annales du Disque-Monde, je dois avouer que je n'ai pas du tout été emballée par les derniers tomes. Ca doit bien faire dix ans que je ne ris plus aux éclats en les lisant, que je ne les dévore plus en deux ou trois jours et que je ne m'émerveille plus des multiples trouvailles de l'auteur. Dix ans pendant lesquels la série s'est essentiellement centrée sur le Guet d'Ankh-Morpork, qui n'a jamais été mon groupe de personnages préférés; dix ans pendant lesquels elle s'est spécialisée dans une satire sociale souvent bien vue mais chaussée de trop gros sabots à mon goût. Quand j'ai entamé "Snuff", dont le commandant Vimes est une fois de plus le héros, je ne nourrissais donc pas de grands espoirs. 

(Attention, petits spoilers!) Vimes, citadin dans l'âme, est contraint par son épouse dame Sybil à prendre des vacances à la campagne avec leur fils Sam Junior. Il répugne à s'éloigner ainsi de son travail de policier... et comme de bien entendu, à peine arrivé au manoir de la famille Ramkin, il flaire la culpabilité de la noblesse et de la magistrature locale. Pendant qu'il tente de déterminer quel crime a été commis dans ce village d'apparence si paisible, quelqu'un tente de le faire accuser du meurtre du forgeron. En cherchant le moyen de se disculper, Vimes découvre une colonie de gobelins installée dans une colline. Ces créatures peu ragoûtantes, considérées comme les damnés de la Terre plus misérables des misérables, se révèlent pourtant capables d'étonnantes prouesses artistiques. Et surtout, elles lui réclament justice. Or, s'il y a une chose à laquelle Vimes n'a jamais pu résister, c'est l'appel de la loi. 

Plus honnis encore que les nains, les trolls ou les vampires, les gobelins fournissent à Terry Pratchett l'occasion d'un nouvel appel à la tolérance raciale. C'est bien intentionné mais quelque peu éculé: d'entrée de jeu, on devine que tout ça débouchera sur le recrutement de certains d'entre eux dans le Guet, devenu au fil des tomes une sorte d'arche de Noé pour les espèces intelligentes. Pourtant, j'ai pris beaucoup de plaisir à lire "Snuff". Niveau humour, je l'ai trouvé nettement au-dessus des dix précédents, et j'ai maintes fois gloussé pendant ma lecture. Une fois n'est pas coutume, j'ai aussi été émue par le sort des gobelins, l'auteur n'hésitant pas à jouer exceptionnellement sur la corde sensible de son lectorat. D'habitude, ses personnages de losers et de parias ont un trait de caractère qui empêche de se sentir totalement désolé pour eux: la lâcheté et la chance de Rincevent, par exemple. Là, n'importe qui aurait envie de se faire le défenseur de ces pauvres malheureux incompris et injustement méprisés. Et puis je suis fan des relations archi-stéréotypées mais très drôles du ménage Vimes, Sybil menant son époux à la baguette sans avoir l'air d'y toucher et celui-ci se laissant faire avec la résignation de quelqu'un qui sait qu'il n'aura jamais le dernier mot. Au rayon des personnages secondaires, on notera une belle prestation de Willikins, le valet de chambre capable de terroriser n'importe quel criminel endurci avec un simple peigne, et on regrettera l'absence de la Mort pour la toute première fois dans les romans adultes de la série. 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire