samedi 5 avril 2014

"De toutes les nuits, les amants"


Fuyuko a trente-quatre ans; correctrice, elle travaille en free-lance pour l'édition, vit seule et ne s'imagine aucune relation affective. Elle ne se nourrit pas de ses lectures: elle décortique les mots, cherche la faute cachée, l'erreur embusquée. Elle n'écrit pas, ne connaît pas la musique, s'habille sans la moindre recherche. 
Mais Fuyuko aime la lumière. Elle ne sort la nuit qu'au soir de ses anniversaires en hiver, seule, pour voir et pour compter les lumières dans ce froid qu'on peut presque entendre si l'on tend l'oreille, dans cet air sec et aride mais quelque part fertile. 
Timide, introvertie, Fuyuko va néanmoins laisser entrer deux personnes aux abords de sa vie: Hijiri, son interlocutrice professionnelle, et M. Mitsutsuka, un professeur de physique qui lui offre un accès d'une autre dimension vers la lumière: le bleu a une longueur d'onde très courte, elle se diffuse facilement, c'est pourquoi le ciel apparaît si vaste. 

Ce titre poétique. Cette quatrième de couverture alléchante. Cette héroïne au métier si proche du mien. La garantie de qualité offerte par le label Actes Sud. Ce roman allait beaucoup me plaire, j'en étais certaine.

Erreur. Ce roman est le pire que j'aie lu depuis le début de l'année, au minimum. Pour surmonter son incapacité à avoir des rapports sociaux normaux, Fuyuko boit. Et son alcoolisme tranquille est à peu près la seule chose qui la définit. Pour le reste, le personnage est sans saveur et sans intérêt. Sa collègue Hijiri, censée (j'imagine) représenter la femme japonaise moderne et libérée, se livre à des monologues si insupportables de certitude et de bêtise qu'on a envie de lui taper sur la tête pour la faire taire. M. Mitsutsuka reste parfaitement transparent tout au long du livre, et on ne comprend même pas ce qui peut bien attirer Fuyuko chez cet homme terne de vingt ans son aîné. Et l'histoire? Bah, il n'y en a pas vraiment. Fuyuko biberonne du saké, Fuyuko écoute parler Hijiri, Fuyuko travaille méthodiquement mais sans passion, Fuyuko bien bourrée retrouve M. Mitsutsuka au café et ne trouve rien à lui dire pendant des mois. J'ai pourtant l'habitude de la littérature japonaise, de son rythme souvent lent, de la pudeur de ses personnages qui contraste si fort avec les débordements amoureux occidentaux. Mais là, il n'est même plus question de pudeur pour moi: juste d'un vide abyssal.

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